2. Ceux qui connaissent la musique et les autres

Totaka-san, lorsque vous êtes devenu producteur, vous devez avoir mis en pratique quelques-unes de vos idées. Le jeu a-t-il pris aussitôt sa forme définitive ?

Non, pas du tout.

Vous vous souvenez du tournant ?

Lorsque nous avons abandonné la notation musicale. C'était tellement mieux de jouer sans partition à l'écran.

Vous voulez dire les indications comme nous pouvons les voir sur d'autres jeux musicaux pour indiquer le rythme à suivre ? C'était une décision plutôt radicale. Comment en êtes-vous arrivés là ?

Eh bien, lorsque j'ai joué en mode multijoueur avec d'autres membres de l'équipe, je me suis aperçu que nous n'écoutions pas les interprétations des autres.

Parce que vous étiez concentrés sur la partition. (rires)

Exactement. Nous étions trop occupés à appuyer sur les boutons.

En tant que musicien, vous ne preniez pas de plaisir à jouer de la musique ?

Non, pas du tout. Lorsque je joue d'un instrument pendant mes loisirs, le plaisir consiste à se laisser aller. Ce n'est pas du tout ce que je ressentais en essayant de suivre une partition.C'est la même chose lorsque je joue d'un véritable instrument de musique. Si je reste le nez sur la partition, je n'ai pas ce sentiment de liberté. Avoir les grandes lignes d'une partition pour, ensuite, se laisser aller à jouer est nettement plus agréable.

Je comprends. Vous avez donc enlevé la notation. Tout le monde était d'accord ?

Non. (rires)

J'ai protesté de toutes mes forces. (rires)

Ah oui !? Je vois. Vous n'imaginiez pas un jeu musical sans notation musicale ?

C'est ça. Les gens qui connaissent la musique, tels que Totaka-san, savent suivre le rythme. Cela ne fait rien qu'il y ait ou non une partition. En revanche, pour quelqu'un comme moi qui ne savais même pas jouer de la flûte à l'école primaire, ce n'est pas facile de savoir quoi faire sans indications.

Ah. Et pour ce qui est de l'expérience musicale...

Je n'en ai pas.

Aucune.

Encore moins que moi !

C'est drôle. (rires) Cette équipe comptait un musicien professionnel et quelqu'un qui ne connaissait presque rien à la musique !

C'est pour cette raison que j'ai longtemps été contre l'idée de me débarrasser des partitions.

Oui. Longtemps. (rires)

Pendant qu'ils essayaient de se convaincre l'un l'autre, que faisiez-vous, Wada-san ?

Pas grand-chose.

Hé, ça ne va pas du tout ! (rires)

Pour ce qui est des partitions, je n'avais pas vraiment de connaissances musicales, mais je ne m'en sortais pas trop mal. Ce n'était pas fantastique, mais...

Vous êtes manuel ? C'est pour ça ?

Peut-être. La difficulté du jeu n'était pas encore bien réglée, mais je me suis bien amusé car je suis du genre à faire de mon mieux même avec des contraintes. En revanche, Morii-san était vraiment nul.

C'était bien triste. (rires)

Ha ha ha !

Mais c'était le meilleur pour voir les problèmes que pourraient rencontrer les gens comme lui. De nombreuses fonctions ont été ajoutées grâce à ses remarques.

Vous pouvez me donner des exemples ?

Pour commencer, les leçons.

C'est vrai.

J'ai demandé à l'équipe de préparer un nombre minimum de

Vous avez enregistré un morceau au début ?

Euh, oui. C'est vrai. (rires)

Quelque chose de jazzy.

Quelqu'un lui avait dit : "Pourquoi vous n'essayez pas ça ?" En apprenant les leçons, il réussit à s'en sortir tout seul. Il était déchaîné et criait : "J'y suis arrivé."

Je l'ai fait écouter à tout le monde.

Oui ! C'est vrai.

Après avoir vu un extrait de ce que Totaka-san avait interprété, je voulais faire la même chose. Je demandais à Hikino-san, le producteur adjoint, comment obtenir quelque chose de proche, quelque chose de jazzy. Il me dit que je devais commencer par chaque instrument et que tout s'imbriquerait ensuite.

Ainsi l'interprétation que vous avez faite semblait jazzy.

Oui ! (rires) Je courais un peu partout en disant à tout le monde : "Ecoutez ça !" (rires)

C'est vrai. (rires) Il me l'a fait écouter et j'ai trouvé ça pas mal.

Vous voyez ? Tout le monde aimait.

Quelqu'un qui ne savait pas jouer de musique avait pu enregistrer quelque chose de jazzy. Il avait réussi et tout le monde pensait que c'était bien.

J'étais surpris.

Moi aussi. Techniquement, ce n'était pas parfait, mais il y avait un son différent, presque mystérieux.

On y sentait l'élément humain.

C'est ça.

Les idées commencèrent à fuser. Nous pensions : "Proposons plusieurs genres musicaux ! Si vous n'apprenez que ceci, vous pouvez jouer du jazz ! Si vous faites ça, c'est du tango. Et cette fonction ne serait-elle pas amusante ?"

Nous étions partis.

Tout à coup ?

Oui. Nous avons tout fait d'un coup.

Totaka-san a mis au point une série de genres lors d'une poussée créatrice.

C'était grâce au premier morceau de Morii-san.

C'était donc préférable de ne pas travailler qu'avec des collaborateurs connaissant la musique.

Exactement. Ceci dit, il lui manquait des connaissances de base. J'étais parfois surpris qu'il ait tant de lacunes ! (rires)

Je n'arrêtais pas de leur demander ce qu'était une mesure. (rire)(Iwata rit)