Shikata-san et Mouri-san, vous étiez encore affectés aux projets Wii U quand Miyamoto-san a donné son accord au cours de la 4e présentation, c'est bien ça ?
Oui.
Je les avais toujours conviés aux présentations. Miyamoto-san a dit que cela servirait de base à un nouveau jeu Zelda et le développement a commencé pour de bon.
Nous avons procédé par tâtonnements pour obtenir la vue de dessus.
Oui, c'est vrai.
En ne choisissant qu’une vraie vue du dessus, vous ne pouviez voir que le chapeau de Link. Comme un mystérieux objet vert se déplaçant tout seul ! (rires)
(rires)
Une véritable vue du dessus pose de nombreux problèmes. Si vous la réalisez dans les règles, ce n'est pas intéressant du tout.
C'est exact.
Il faut simuler une vue du dessus, mais ce doit être convaincant.
Exactement. Nous avons décidé de truquer un peu. C'est lors d'une interview à la New York Comic-Con15 en octobre que...15. Comic-Con : manifestation culturelle organisée dans des villes telles que New York et San Diego mettant l'accent sur les comics, les films et plusieurs formes de divertissement. Nintendo était représenté à la New York Comic-Con de 2013.
... vous avez révélé l'astuce.
Oui. J'ai montré à des fans de Zelda des images d'une vue latérale et d'une vue du dessus et celle-ci montrait que Link et les rubis étaient inclinés.
J'ai vu ces images. Le monde de jeu était si étrange que je me suis dit : "Le monde ne tourne pas rond !" (rires)
Oui. Nous avons volontairement incliné les objets vers l'arrière afin que vous puissiez voir les visages et les corps de Link et des autres personnages en les regardant du dessus.
Ainsi, en lieu et place d'un objet vert méconnaissable, vous aviez Link.
Exactement ! (rires)
Ensuite, nous avons dû régler cet autre problème dans lequel nous nous étions fourrés.
Vous parlez des 60 fps16 ?16. 60 fps (frames per second - images par seconde) : rafraichissement de l'image affichée à l'écran 60 fois par seconde.
C'est bien ça. Quand Mouri-san a tout à coup voulu 60 images par seconde, je lui ai demandé : "Comment ? 30 images par seconde suffisent pour The Legend of Zelda !" Il a insisté, et quand je lui ai demandé pourquoi, il m'a dit que ça rendrait la 3D stéréoscopique plus stable.
Ça représente le double de la fréquence de rafraichissement habituelle et cela offre des graphismes plus fluides.
Oui. De cette manière, la 3D stéréoscopique s'affiche bien mieux. Je leur ai demandé de me montrer le jeu à 30 images par seconde et à 60 images par seconde. La différence saute aux yeux.
Certaines personnes ont même dit qu'ils avaient l'impression que l'écran brillait.
Qu'il brillait ? Ce n'est pas vraiment des termes qu'un programmeur prononcerait.
Eh bien, ce n'est pas très scientifique, mais... (rires)
(rires)
La différence était visible, et je voulais vraiment y arriver, mais rendre l'univers de The Legend of Zelda à 60 images par seconde risquait d'être difficile.
Cela pouvait avoir un impact négatif sur la qualité des graphismes.
Oui. J'ai donc demandé : "Si nous faisons ça, nous nous mettons dans le pétrin. Tu en es conscient ?" Mouri-san m'a répondu sans sourciller : "Tout se passera bien si nous nous décidons pour du 60 images par seconde dès le départ."
Cela aurait été difficile de passer en 60 images par seconde en cours de développement, mais, en prenant cette décision dès le début, vous pouviez développer le jeu en fonction.
Exactement.
Cela revenait à dire : "Je te laisse te débrouiller."
Mouri-san, vous pouvez nous dire la vérité maintenant. Vous n'avez pas regretté votre choix ? Pas une fois ?
(Avec une certaine fermeté) Moi ? Pas une fois.
Et ça se sent ! Vous faites preuve d'une telle détermination ! (rires)
En essayant, j’ai vu que le résultat était complètement différent. J'avais beau savoir que ce serait difficile, j'étais convaincu qu'il fallait partir sur 60 images par seconde. Je suppose que ça ne facilitait pas la tâche des concepteurs.
Ah. Il y avait également des conséquences pour l'équipe de conception.
Nous trouvions aussi que c'était plus joli en 60 images par seconde.
Vous n'avez pas eu l'impression d'être persécuté ?
Non. Même lorsque vous désactivez la 3D, le résultat change vraiment.
Le résultat change même sans la 3D stéréoscopique ?
Oui. Grâce à cette fréquence élevée, le mouvement est fluide lorsque Link brandit son épée et tout est très soigné lorsque vous battez un ennemi. Nous avons donc très bien pris l'idée de réaliser le jeu en 60 images par seconde.
Vous réduisiez la charge de traitement, mais il fallait que le résultat paraisse correct. La conception n'a pas dû être de tout repos.
Pas du tout ! Les programmeurs avaient tout optimisé pour nous, et nous avons travaillé comme d'habitude.
Du très beau travail d'équipe ! (rires)
Enfin, peut-être pas si beau que ça ! (rires)
Non, c'était loin d'être beau. (rires)
Évitons de trop entrer dans les détails. (rires)
(rires)
Quels ont été les aspects positifs de cette fréquence élevée ? À part la 3D stéréoscopique stable, des mouvements d'épée fluides et un écran brillant... (rires)
(rires) Eh bien, vous changez d'objet depuis l'écran tactile et vous choisissez les objets en faisant un glisser-déposer .
Le choix des objets est intuitif.
Oui. En fait, je voulais déjà faire ça avec Ocarina of Time 3D.
Mais la fréquence de rafraichissement n'était que de 30 images par seconde.
C'est pour cette raison que nous n'avions pas pu le faire. À cette vitesse, le jeu ne peut pas suivre le mouvement du stylet. En revanche, à 60 images par seconde, tout est très fluide. Il y avait tant d'avantages, mais jusqu'à la fin, j'ai eu peur que ça ne tienne pas la route.
Mais vous y êtes arrivé ?
Tout à fait. Et cela me rend extatique ! (rires) Je crois que c'est grâce à Mouri-san. Il a décidé de passer en 60 images par seconde, mais n'a jamais perdu la foi.
J'en étais sûr. Du très beau travail d'équipe ! (rires)
(rires)
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