Sakaguchi-san, avez-vous l'impression d'être arrivé à la fin du projet sans avoir jamais faibli au sujet des objectifs que vous vous étiez fixés ?
Oui. C'est dans ma nature, je cherche vraiment à faire plaisir aux joueurs. Mais avec ce titre, je me suis permis de me détendre un peu à ce niveau. Et puis, comme je me détendais, j'ai ressenti à nouveau ce désir de fournir aux joueurs ce qu'ils souhaitaient. En fait, ce qui me semble être le plus difficile, c'est de parvenir à contrôler cet élan.
Donc, vous avez abandonné l'idée de créer un jeu qui viserait à faire plaisir aux joueurs, et vous aviez décidé de ne pas vous laisser détourner du chemin que vous aviez choisi.
C'est vrai. Et c'est comme ça que je me suis retrouvé à remplir le jeu de choses qui nous enthousiasmaient, comme le fait d'enchaîner cet ogre. Mais bien sûr, les choses de ce genre ont été ajoutées plus tard, ce qui n'est pas idéal en termes d'efficacité...
Mais si vous n'aviez pas choisi cette approche, beaucoup d'éléments du jeu n'y auraient jamais été inclus.
C'est vrai. Mais au départ, on voulait vraiment faire les choses de façon efficace. On avait retenu les leçons de nos erreurs faites sur Blue Dragon, et on a pu aborder les choses de façon efficace en créant les décors, les personnages, leurs tenues, et en déterminant comment les donjons fonctionneraient. C'est la raison pour laquelle nous avons pu passer tant de temps à atteindre un bon résultat pour une chose comme le 'Magnétisme'.
C'est précisément parce qu'on s'était bâti une base si solide que cela que l'on a pu bricoler le 'Magnétisme' pendant aussi longtemps.
Pensez-vous être parvenu à réaliser la vision que vous avez eue quand vous en aviez initialement parlé autour d'un verre à Tokyo ?
Oui, je crois, oui.
Je pense que c'était vraiment une belle façon de lancer un projet.
Mais il est très rare que les choses commencent comme ça. Surtout quand on sait qu'on a tous les deux expérimenté le même choc précisément au même moment.
Je crois qu'à la base, il faut avoir en quelque sorte certaines idées en commun. Si vous n'avez rien expérimenté ensemble, au même moment, ça peut être difficile d'avancer dans la même direction.
Quand j'ai parlé à l'équipe de ce dont nous avions discuté avec Sakaguchi-san ce soir-là, j'ai eu l'impression que tout le monde partageait le même sentiment que nous, et a été très réceptif à ce que l'on avait à dire.
Je crois que c'est parce que vos sentiments on rencontré un certain écho dans l'équipe que vous avez réussi à franchir la ligne d'arrivée, même après avoir couru ce qui a dû parfois vous faire penser à un marathon sans fin.
En fait, on n'avait pas vraiment en tête un jeu réel que nous voulions concrétiser. On avait juste regardé un certain nombre de vidéos sur un site de partage, et cela nous avait inspirés pour trouver notre propre idée de ce qui constituerait un 'jeu next generation'.
Mais ce jeu n'existait pas en réalité.
C'est vrai. C'est pourquoi on a dû constamment dire à l'équipe de regarder ces vidéos et toujours rester fidèles au jeu que nous avions imaginé.
Vous aviez visionné ces vidéos, et elles vous ont fait en quelque sorte ressentir que vous étiez un peu hors du coup, cela vous a inspiré pour imaginer un nouveau type de jeu. Il n'existait pas de vrai jeu semblable à celui que vous aviez imaginé. Donc, vous avez décidé de créer ce jeu qui vous avait tant bouleversés dans votre imagination.
C'est vrai. Il arrive que l'on découvre des films ou des films d'animation qui ont un petit quelque chose qui nous bouleverse. Je crois que sur ce projet, on a trouvé cette vidéo précisément au bon moment.
Maintenant, j'aimerais terminer en demandant à Matsumoto-san de me dire s'il a trouvé qu'il était difficile de travailler avec Sakaguchi-san, et s'il y a trouvé des aspects positifs ?
C'est là que je dois quitter la pièce ? (rires)
Oui, c'est certainement mieux que vous ne soyez pas là quand je vous fais des compliments. (rires) Ce que je trouve de plus impressionnant chez Sakaguchi-san, c'est la rigueur dont il fait preuve quand il s'agit d'atteindre ses objectifs. Je suis quelqu'un qui ne s'attardera peut-être pas autant pour obtenir le produit fini qu'il veut, c'est donc une chose qui m'a beaucoup impressionné à la fois dans Blue Dragon, et dans ce projet.
Donc vous avez lutté pour combler la brèche entre ce que vous considériez comme un produit fini, et l'idée que Sakaguchi-san s'en faisait.
C'est vrai. J'essaie souvent de penser aux choses en imaginant comment Sakaguchi-san les verrait, et je me dis à chaque fois : 'Non, ce n'est pas encore assez bien'. Mais j'avais l'impression très forte d'avoir une très grande marge d'amélioration. Le plus difficile, c'était que mes propres insuffisances ressortaient vraiment, mais le côté positif, c'est que je ressentais toujours ce potentiel d'amélioration, et je suis prêt à travailler dur pour y arriver.
Ah, je crois que vous dormirez mieux, cette nuit. (rires)
(rires) Alors voilà, on sait tout : les véritables sentiments de quelqu'un qui a travaillé en étroite collaboration avec Sakaguchi-san pendant sept ans et demi. Maintenant, il y en a qui disent que dans les métiers créatifs, les pouvoirs déclinent avec l'âge. Mais je n'y crois pas le moins du monde. Je crois qu'un grand fossé sépare les différentes personnes. Il y a trois ans, un créateur de jeu de l'envergure de Sakaguchi-san a vu une vidéo qui l'a bouleversé et l'a poussé à se creuser la tête pour trouver une façon d'y réagir. Mais il a passé les trois années suivantes plein d'enthousiasme et de passion, mettant tout son cœur et toute son âme dans la création de The Last Story. Je crois que si les joueurs arrivent à comprendre la passion qui a été investie dans ce titre, cela ne les laissera pas indifférents. Le jeu va très bientôt sortir. Ça va peut-être sonner un peu bateau de dire ça, mais j'aimerais demander aux joueurs de patienter encore un tout petit peu. Sakaguchi-san et Matsumoto-san, merci beaucoup à vous deux d'être venus me voir aujourd'hui.
Merci beaucoup.
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