Outre l’épée, divers objets tels l’arc et les flèches et le grappin apparaissent dans The Legend of Zelda : Ocarina of Time. Comment les avez-vous conçus ?
En ce qui concerne les objets, nous avons fait chacun d’eux en nous disant : « Ce serait bien d’avoir quelque chose comme ça. » Je déclarais : « Le grappin est créé, vous pouvez l’utiliser » et tout le monde répondait : « Bon, où est-ce qu’on va le mettre ? »
Oui. (rires) Même quand nous avions un objet, nous ne savions pas forcément où le mettre. Nous avons déterminé le nombre d’objets au départ, mais cela a fini par nous causer des ennuis.
Vous avez dû respecter le nombre d’objets déterminé au début.
Oui. Et une fois terminés les premiers donjons, un nouvel objet était créé et quelqu’un me disait : « Faites en sorte que cela ne pose pas de problème si Link entre dans le donjon avec cet objet. » Et je pensais : « Sans rire ! Vous auriez dû me le dire dès le début ! » (rires)
Je suis désolé. C’est moi qui faisais les objets, donc...
Non, ne vous inquiétez pas pour ça. (rires)
Si l’on se contente de faire tout ce qu’on veut au fur et à mesure, on est sûr d’avoir des ennuis à un moment où un autre.
Mais d’un autre côté, ce n’est pas parce que l’on décide dès le départ des objets que l’on va intégrer que tout va bien se passer. Je ne pense pas qu’en procédant ainsi, une telle diversité d’objets aurait vu le jour. Nous étions en train de créer quelque chose qui n’avait pas de précédent, il nous était donc impossible de savoir ce qui serait bien ou quel était l’objectif à fixer.
Il n’y avait pas de précédent, personne ne pouvait donc déterminer précisément la marche à suivre.
Exact. Quand nous avons parlé du script, un peu plus tôt, nous avons évoqué le risque de voir le projet s’effondrer, mais pendant que nous le faisions, nous ne savions pas vraiment s’il était en train de se casser la figure ou non. (rires)
(rires)
Ça a été le bazar jusqu’à la toute fin.
Nous n’avions aucune idée du genre de jeu que c’était jusqu’à ce que tous les éléments soient rassemblés.
Vous avez créé The Legend of Zelda : Ocarina of Time sans savoir le jeu que c’était avant que tous les éléments ne soient rassemblés. Comment avez-vous vécu cela, Kawagoe-san, lorsque vous faisiez les scènes cinématiques ? (rires)
Que devrais-je dire à ce propos ? (rires) Même après que le jeu a été terminé, en gros, il a fallu changer beaucoup de choses à l’intérieur. Par exemple : « Vous savez, cet objet, là, dans ce donjon ? Eh bien, on a besoin de l’utiliser dans cet autre donjon. »
On se dit, « Hé ! Mais vous auriez dû me le dire plus tôt ! » (rires)
Et ce genre de choses a tendance à se concentrer vers la fin du développement. Le script changeait dans un sens, puis dans un autre... Ou plutôt, il changeait totalement.
(rires)
Notre faculté d’adaptation à tous ces changements drastiques était pour nous un moyen de prouver notre compétence.
Il arrive parfois à Miyamoto-san de décider, lui aussi, de changements drastiques.
Je m’inquiétais toujours de savoir ce qui allait surgir. Mais je me disais que telle ou telle chose pouvait arriver, j’ai donc préparé un outil pour faciliter ces changements. Nous faisions des scènes cinématiques en temps réel, donc même si les vêtements ou les objets changeaient, je pouvais faire l’échange dans la scène.
À l’époque, les scènes cinématiques pré-rendues, c'est-à-dire préparées à l’avance, étaient chose courante, mais celles de The Legend of Zelda : Ocarina of Time étaient rendues en temps réel, ce qui veut dire que les vêtements ou le masque que vous portiez sur le moment apparaissaient.
Exact. Il n’y a pas eu de gros problèmes à ce niveau-là.
Miyamoto-san n’aime pas tellement les cinématiques, de toute façon.
J’exagère peut-être un peu, mais Miyamoto-san n’a sans doute pas besoin de scènes cinématiques du tout.
Mmm, peut-être bien que non.
Il dit que l’on peut s’en passer, mais que si l’on doit en avoir, il veut pouvoir avoir un moyen de les refaire encore et encore.
La dernière excuse qu’il veut entendre, c’est : « Je ne peux pas le changer, parce que les scènes cinématiques sont déjà faites. »
Il dit que ça ne pose pas de problème de faire des cinématiques, mais que l’on doit être capable de les changer jusqu’à l’avant-dernier jour du projet.
Oh, c’est dur. (rires)
(rires)
J’avais été habitué à cette manière de voir les choses dès Super Mario 64, les scènes cinématiques pré-rendues n’avaient donc jamais fait partie des options. Kawagoe-san avait diligemment trouvé un moyen de créer des démos en temps réel et cela s’est avéré payant dans The Legend of Zelda : Ocarina of Time.
Parmi les démos en temps réel, la scène d’ouverture est particulièrement frappante. Comment avez-vous fait cela ?
Aujourd’hui, on peut utiliser un outil d’infographie pour déplacer la caméra, mais à l’époque, la façon dont le jeu était construit ne le permettait pas. Nous avons donc demandé à créer le système permettant à la console Nintendo 64 de déplacer la caméra et nous l’avons ensuite utilisé.
La musique faite par (Koji) Kondo-san16 existait déjà, et vous avez créé les images correspondantes ? 16Koji Kondo : département Développement logiciel, division Analyse et développement du divertissement, Nintendo. Il a composé la musique des séries Legend of Zelda et Super Mario Bros.
Non, la musique est venue après. Le modelé de la plaine d’Hyrule n’était à l’origine pas conçu pour les scènes cinématiques, donc même si l’on se disait : « Je veux filmer une scène comme ça » ...
Il n’existait pas nécessairement d’endroit adéquat dans le jeu.
C’est cela. J’ai donc promené la caméra comme si j’étais moi-même en train d’arpenter le terrain, en me disant : « Est-ce que c’est un bon endroit, ici ? » et « Et par là-bas » ? Je me suis baladé à la recherche d’un endroit qui rendrait bien, comme si je cherchais un lieu de tournage de film.
Vous recherchiez virtuellement un lieu.
C’est cela. Au début de la séquence, on voit une scène où Link se promène à cheval. Je me suis dit que c’était un bon endroit et j’ai attendu un moment, puis la lune s’est glissée dans le décor.
Par hasard ?
Oui. Je me suis dit : « Ça y est ! », et j’ai arrêté mon choix sur cet endroit.
C’était trop beau pour être vrai ! (rires)
Je crois que le hasard a largement contribué à The Legend of Zelda : Ocarina of Time, mais je soupçonne Miyamoto-san de continuer à croire que les scènes cinématiques en temps réel sont faciles à modifier.
Oui. C’est effectivement ce qu’il pense. (rires)
En réalité, c’est loin d’être aussi facile ! (rires)
Je suis donc toujours inquiet de ce qui va se passer. Encore maintenant ! (rires)
(rires)
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