Note de la rédaction : certaines vidéos présentées dans cette entrevue sont extraites de la version japonaise du jeu. En France et en Belgique, ce jeu est disponible en français.
Il s’agit de notre cinquième session « Iwata demande » sur The Legend of Zelda: Skyward Sword et je vous ai tous réunis ici aujourd’hui pour parler du ciel et de la ville. Tout d’abord, merci d’être venus.
Tout le plaisir est pour nous.
Aonuma-san, vous n’êtes pas assis à la même place que d’habitude. (rires)
J’ai l’impression de ne pas vraiment être à ma place. (rires)
D’habitude, vous êtes assis au bout, comme pour dire : « Je suis le producteur », alors pourquoi êtes-vous assis à gauche de Fujibayashi-san aujourd’hui ?
C’est moi qui ai planifié l’espace de jeu dans le ciel.
Alors c’est Fujibayashi, le réalisateur du jeu, qui vous a dirigé ? (rires)
Oui. (rires)
Plus tard, je vous demanderai de nous parler de votre travail plus en détails. Tout le monde à part Aonuma-san et Fujibayashi-san est nouveau aujourd’hui, alors j’aimerais que vous vous présentiez.
Je suis Iwamoto de la Division d’analyse & développement du divertissement (EAD). J’étais chargé de la planification globale du ciel et de la ville. J’ai travaillé sur la séquence d’introduction, des quêtes annexes mettant en scène Link et les habitants de la ville, ainsi que des scènes sur le dos du célestrier dans le ciel. (Note de l’éditeur : dans le jeu, les gens qui vivent dans le ciel possèdent leurs propres oiseaux gardiens appelés les célestriers.)
Iwamoto-san était le « cerveau du ciel ».
Ils m’appelaient aussi le « Dieu du ciel » de façon ironique. (rires)
De façon ironique ?
Il se peut que j’en ai fait un peu trop parfois, alors…
Nous en reparlerons tout à l’heure. (rires)
Je suis Hisada de l’EAD également. Je me suis occupée de la coordination globale du terrain. Avec Iwamoto-san, j’ai surtout travaillé sur le ciel et sur la ville. J’ai choisi le type de terrain à utiliser et coordonné le style des décors et des illustrations.
C’était donc un rôle extrêmement important pour créer l’atmosphère du monde de jeu.
Oui.
Je suis Mizuta de l’EAD. J’ai travaillé sur le son. J’ai travaillé sur le système de base pour générer la musique de fond et les effets sonores. J’ai composé certains effets sonores moi-même et coordonné le système sonore global du jeu. J’ai également travaillé sur l’instrument de musique et les idées spécifiques qui l’exploitent. Les sons sont présents dans tous les terrains de jeu, alors je n’ai pas seulement créé les sons pour le ciel et la ville. Mais comme c’est une bonne occasion de parler du son, je participe à cette session.
Combien de personnes ont travaillé sur le son cette fois-ci ?
Dix personnes.
Autant que ça ?
Oui. Cinq personnes ont travaillé sur les effets sonores et le système sonore et cinq autres personnes étaient les compositeurs, ce qui fait dix au total.
Ça fait beaucoup de monde. Pourquoi y a-t-il eu besoin d’autant de gens ?
La première année et demie, le compositeur (Hajime) Wakai-san1 et moi avons préparé l’instrumentation et posé une base sonore globale. 1 Hajime Wakai : Département de développement logiciel, Division d’analyse & développement du divertissement (EAD), Nintendo. Il a travaillé sur le son de plusieurs jeux, dont Star Fox 64, Pikmin, The Legend of Zelda: The Winder Waker et nintendogs. Il a officié en tant que réalisateur sonore sur The Legend of Zelda: Skyward Sword.
Wakai-san sera parmi nous la prochaine fois. C’est lui qui a rassemblé tous les sons pour ce jeu.
Oui, c’est vrai. Au début, il n’y avait que nous deux, mais dès que nous avons réalisé le nombre de niveaux qu’il y aurait et l’ampleur des évènements, l’équipe s’est agrandie. C’était impossible que deux personnes puissent gérer le son toutes seules, alors j’ai demandé à (Koji) Kondo-san2 qu’on soit plus nombreux. 2 Koji Kondo : Département de développement logiciel, Division d’analyse & développement du divertissement (EAD), Nintendo. Il a composé de nombreux morceaux pour des séries comme 25ème anniversaire de Super Mario Bros. et Iwata demande : The Legend of Zelda: Ocarina of Time 3D
Alors vous êtes passés directement à dix personnes ?
Non, ça s’est fait progressivement. La dernière personne nous a rejoints cette année pour les effets sonores.
C’est vrai. L’équipe n’a pas toujours compté dix personnes.
Le travail sur le son est toujours plus dense vers la fin, et comme il y avait beaucoup à faire cette fois-ci, l’équipe s’est beaucoup agrandie.
Oui, oui… (acquiescent)
Il n’y a jamais eu une équipe du son composée de dix personnes pour aucun autre jeu développé chez Nintendo en interne avant, n’est-ce pas ? C’est le contenu riche du jeu qui a fait que l’équipe du son a dû s’agrandir autant.
Tout à fait. Cette fois-ci, la bande-son est orchestrale. Nous avons créé des effets sonores pour chaque scène et il y avait aussi les voix des personnages. Le travail sur le son était donc très varié sur ce jeu.
Je vois. Combien y avait-il de concepteurs, Hisada-san ? J’ai déjà peur de la réponse ! (rires)
Voyons voir… En tout, si on tient compte des décors, ça fait 22 personnes.
Juste pour le terrain ? Normalement, c’est le nombre de personnes qui travaillent sur un jeu dans son ensemble !
C’était beaucoup, c’est vrai.
(acquiescent de concert)
C’est du jamais vu pour The Legend of Zelda.
C’est vrai. C’est du jamais vu pour un jeu The Legend of Zelda… voire n’importe quel autre jeu de Nintendo.
Le nombre de concepteurs était donc très élevé lui aussi, en raison de la richesse du jeu.
C’est ça. (rires)
Aonuma-san, vous avez travaillé sur le ciel en tant que planificateur. Qu’avez-vous fait exactement ?
Tout d’abord, j’aimerais expliquer ce qui nous a amenés à créer un espace de jeu dans le ciel.
D’accord, allez-y.
D’habitude, les jeux The Legend of Zelda que nous créions se déroulaient sur la terre ferme et les différentes zones étaient reliées entre elles. Cette fois-ci, nous avons créé tellement d’éléments de jeu pour la forêt, le volcan et le désert qu’il nous fallait créer des routes pour passer d’une zone à l’autre. Et chaque fois, c’était très difficile de trouver comment gérer cela.
Les routes sont particulièrement importantes dans un jeu comme The Legend of Zelda.
En effet. Mais la première chose que nous nous sommes dit, c’est que nous n’aurions peut-être pas besoin de routes cette fois-ci.
Comment cela ?
Eh bien, Fujibayashi-san et moi avons discuté longuement du fait que si le gameplay était riche dans chaque zone, nous ne serions pas obligés de les relier physiquement. Et ensuite, nous nous sommes posé la question : « Comment faire ça ? »
Et à quoi avez-vous pensé ?
Au choix des stages dans les jeux Super Mario.
Au choix des stages ?
Oui. Dans les jeux Super Mario, il y a un écran pour choisir le stage où vous voulez aller et y accéder directement.
Encore une fois, vous vouliez quelque chose d’insensé pour le monde de The Legend of Zelda ! (rires)
Oui ! Pour moi, Aonuma-san est le roi des requêtes insensées ! (rires) Je ne pouvais décemment pas lui dire : « Oui, faisons cela ! »
Maintenant que vous avez dit ça, j’ai la musique du choix des stages dans Super Mario qui me trotte dans la tête. Et ça ne colle pas du tout avec l’atmosphère de The Legend of Zelda ! (rires)
C’est parfait dans Super Mario, mais nous avons discuté longtemps du fait qu’on ne pouvait pas faire ça de la même manière dans The Legend of Zelda.
Lors de ces discussions, nous avons eu l’idée d’un point de départ qui flotte dans le ciel. Quand j’ai entendu ça, je me suis dit qu’au point de vue structurel, c’était possible que Link atterrisse depuis les airs.
Et donc, plus besoin de routes ! (rires)
Voilà. Mais ensuite, nous nous sommes demandés : « Comment le faire atterrir ? »
Était-ce votre idée de le faire atterrir, Fujibayashi-san ?
Oui. Je me suis souvenu d’une vidéo que j’avais vue à la télé, je crois. Une femme s’était évanouie lors d’un saut en parachute et un parachutiste plus expérimenté l’a remarquée, a foncé sur elle pour la rattraper, a ouvert son parachute et a atterrit avec elle dans les bras.
Quand vous avez vu ça, vous vous êtes dit que vous l’utiliseriez un jour.
Oui. Je voulais reprendre cette idée dans un jeu un jour, mais je me suis dit que d’avoir le ciel comme point de départ ne serait jamais accepté.
C’était trop vague.
Alors en attendant, nous avons eu l’idée que Link saute d’une tour.
Oh, c’est vrai ! (rires) Le monde était en contrebas d’une tour gigantesque et il fallait monter tout en haut et sauter, remonter et sauter encore…
Et plus vous montiez haut, plus vous pouviez voler loin. Mais… ce n’était pas terrible. (rires)
Et c’est là que vous avez décidé de sauter du ciel ?
Oui. Mais quelque chose clochait pour moi dans le fait de sauter du ciel. Comment le ciel et la terre ferme seraient-ils reliés en termes d’espace ? Nous avons étudié plusieurs possibilités et nous en avons conclu qu’il serait impossible de le faire sans un moyen de transport.
Et c’est donc là qu’intervient Iwamoto-san en tant que cerveau du ciel.
Exactement ! (rires)
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