C’est la première fois qu’un jeu "Mario" possède une bande-son orchestrale. Miyamato-san, qu’est-ce que vous en avez pensé ?
Beaucoup de gens étaient contre cette histoire d’orchestre. Comme ils devaient penser que je dirais non de toute façon, personne n’osait venir m’en parler.
Je les imagine très bien. « Vas-y toi ! Et pourquoi moi, vas-y toi-même ! » (rires)
J’avais envie d’aller leur demander ce qui leur faisait penser que je pourrais être contre l’utilisation de l’orchestre. Je trouvais que les timbales et les cordes étaient l’idéal pour le thème de Super Mario Galaxy, et j’ai donné mon accord très tôt. Mais je pense que tout le monde était inquiet que je me sois un peu emballé et que je me mette à tout changer à la dernière minute.
En vous écoutant, je me rends compte que la musique est elle aussi l’expression d’une fonction, au même titre que le design. A propos, nous avons regardé une vidéo de l’enregistrement de l’orchestre en studio. Vous aviez l’air plongé dans la musique.
Dites-le franchement. Vous pensiez que je dormais, n’est-ce pas ? (rires)
(Rires)
Je vous taquine ! (rires) Yokota-san, qui était responsable du son, savait très précisément ce qu’il faisait. Lorsqu’il m’a dit que la performance d’un musicien changeait en fonction de la façon dont il imaginait que sa musique serait utilisée, je lui ai tout de suite dit que je serai là !
J’ai entendu dire qu’avant de commencer, vous avez longuement parlé à l’orchestre.
J’ai essayé de les impressionner. Ils étaient très surpris d’apprendre que les jeux "Mario" se vendaient à plus de dix millions d’exemplaires à travers le monde. (rires) Je leur ai expliqué que les joueurs allaient refaire le jeu encore et encore, ce qui signifiait que leur musique serait écoutée plus de cent millions de fois !
Seulement cent millions ?
Vous croyez que c’est plus ? (rires) En regardant leurs visages ébahis, je me suis dit que j’avais vraiment bien fait de venir.
Avez-vous une idée de qui va jouer à Super Mario Galaxy, et comment ?
Je crois que les petites amies ne se plaignent plus que leur fiancé joue aux jeux vidéo lorsqu’il a une Wii. (rires) Et les étudiants finissent toujours par se donner rendez-vous chez celui qui a une Wii. Avec cet élargissement du public, je pense qu’un certain nombre de gens vont accueillir Super Mario Galaxy avec soulagement. Jusqu’à présent, il est sorti un grand nombre de jeux qui étaient en fait des compilations de mini-jeux. C’est le premier titre depuis un certain temps dans lequel les joueurs vont vraiment pouvoir se plonger.
A l’époque de Super Mario sur NES, il était très fréquent de jouer à un jeu vidéo à plusieurs dans un salon. Et puis peu à peu, les consoles se sont déplacées dans les chambres, et les jeux ont commencé à être destinés à être joués seul. Mais puisque la Wii est une console de salon, au sens premier du terme, j’espère que l’on jouera à Super Mario Galaxy comme dans le temps. Si le jeu est vraiment bien fait, il est agréable de regarder quelqu’un y jouer.
Je vous ai déjà parlé de la façon dont les équipes de Tokyo me regardaient jouer. Ils avaient beau dire que c’était du travail, je pense qu’en fait, ils passaient un très bon moment ! (rires) Cette fois, les niveaux sont plus courts et on accède aux boss plus tôt, ce qui permet aux gens occupés de pouvoir jouer. Et nous avons aussi placé des bornes au milieu des niveaux.
Dans les précédents jeux "Mario", lorsque vous perdiez, vous deviez recommencer les niveaux depuis le début.
Avec l’avènement de la 3D et l’expansion des mondes dans les jeux, la tendance est à des niveaux plus longs. Je pense que c’est quelque chose qui vaut d’être reconsidéré : recommencer un niveau encore et encore jusqu’à réussir devrait être amusant. Le joueur appréhende plus en profondeur un niveau qu’il a dû refaire un certain nombre de fois. Si l’on truffe les niveaux de bornes, le joueur les termine plus vite et au final, il les oublie aussi rapidement qu’il les a terminés. Cinq ans plus tard, il sera incapable d’exprimer une quelconque opinion. Je veux créer des jeux dont on se souvienne.
L’idéal serait de créer un jeu qui nécessite que le joueur le recommence encore et encore sans qu’aucune lassitude ne s’installe.
Ça n’est qu’une opinion personnelle, mais je sais que lorsque j’écoute un concert classique d’une heure, je ne vais retenir que les moments saillants. Si l’orchestre joue des chansons des Beatles, en revanche, je me souviendrai de la plupart des morceaux. Certaines chansons ont le pouvoir de vous rappeler l’atmosphère et la situation dans laquelle vous les avez entendues pour la première fois. Je crois que les jeux devraient pouvoir faire pareil. Je suis plutôt opposé à la prolifération des bornes en milieu de niveau. D’un autre côté, je conçois que quelqu’un de très occupé ne puisse pas passer une demi-heure à attraper une étoile ! (rires) Je trouve les distances bien équilibrées dans Super Mario Galaxy. Lors de conventions, j’ai entendu des joueurs dire qu’ils appréciaient le tempo du jeu, et même ceux qui en général n’étaient pas fanatiques des jeux de plateformes prenaient du plaisir à jouer. Il est possible de toucher un public qui a priori ne s’intéresse pas aux jeux vidéo, et j’espère que c’est ce que fera Super Mario Galaxy.
Ce jeu a deux missions. Convaincre les gens qui ont des idées préconçues sur la 3D qu’ils peuvent trouver du plaisir à jouer, et montrer à ceux qui pensent que la Wii ne s’adresse pas aux joueurs chevronnés que Nintendo EAD est au top de sa forme et va leur offrir de la jouabilité énergique ! (rires)
Exact ! Je les défie d’arriver à trouver toutes les étoiles ! (rires)
Pouvez-vous nous dire quelques mots en guise de conclusion ?
J’ai fait en sorte qu’il n’y ait pas d’endroit où le joueur pense que c’est la faute du programme s’il n’y arrive pas. Le résultat, c’est que tout le monde trouvera que le jeu en vaut la chandelle. Pour autant, il n’est pas nécessaire d’avoir absolument tout réussi. Il est tout à fait possible de battre Bowser en jouant normalement. Super Mario Galaxy offre la possibilité à chacun de jouer à son rythme, une Super étoile chaque soir en rentrant du travail, par exemple.
Au bout de quatre mois, ils se rendront compte qu’ils en ont trouvé 120.
Ça serait magnifique ! (rires) Ainsi que je l’ai déjà dit, Mario est un jeu où on peut s’amuser simplement en se déplaçant. L’expérience qu’il offre est inédite. J’aimerais que les joueurs émérites aident les autres grâce au jeu en coopération, et que tous explorent ensemble de nouveaux territoires. Faites participer les parents et les grands-parents !
Je l’aiderai de mon mieux ! (rires)
© 2024 Nintendo.