Aujourd’hui, j’aimerais m’entretenir avec vous de The Legend of Zelda: The Wind Waker HD. Mais avant de nous intéresser à la version Wii U, je voudrais que nous évoquions l’original : The Legend of Zelda: The Wind Waker1 sur Nintendo GameCube. Tout d’abord, pouvez-vous vous présenter et nous expliquer quel fut votre rôle sur l’original, ainsi que sur cette nouvelle mouture ? Aonuma-san, commençons par vous.1. The Legend of Zelda: The Wind Waker : jeu commercialisé sur la console Nintendo GameCube en mai 2003.
C’est moi qui étais le directeur de l’original. Cette fois-ci, j’ai officié en tant que producteur et je me suis dit que ce serait l’occasion de corriger le tir sur certains aspects du jeu. Si je me souviens bien, j’ai dit la même chose pour Iwata demande : The Legend of Zelda: Ocarina of Time 3D : le son2 ! (rires)2. The Legend of Zelda: Ocarina of Time 3D : jeu commercialisé sur la console Nintendo 3DS en juin 2011. Il s’agit d’un remake de The Legend of Zelda: Ocarina of Time, opus commercialisé sur la console Nintendo 64 en décembre 1998. Différents éléments y ont été ajoutés, tels que la 3D stéréoscopique.
C’est vrai ! (rires) Iwamoto-san ? Nous avons discuté ensemble de Iwata demande: The Legend of Zelda: Skyward Sword3.3. The Legend of Zelda: Skyward Sword : jeu commercialisé sur la console Wii en novembre 2011. L’action se déroulait autour d’une île aérienne appelée Célesbourg. Le jeu utilisait la technique du cel-shading, les proportions du corps étaient réalistes, et visuellement, il ressemblait à un tableau. La télécommande Wii Plus a rendu l’utilisation de diverses commandes intuitives possible.
Moi, je ne faisais pas partie de l’équipe d’origine, mais j’ai travaillé sur The Legend of Zelda: Four Swords Adventures4 et The Legend of Zelda: Phantom Hourglass5. C’était moi le directeur du jeu cette fois-ci.4. The Legend of Zelda: Four Swords Adventures : jeu commercialisé sur la console Nintendo GameCube en janvier 2005. Il proposait deux modes : Épopée d’Hyrule et Bataille de l’Ombre. Il était possible de jouer en solo, mais le mode multijoueur, où plusieurs consoles Game Boy Advance étaient reliées entre elles, constituait l’attrait majeur du jeu.5. The Legend of Zelda: Phantom Hourglass : jeu commercialisé sur la console Nintendo DS en octobre 2007. La mécanique du jeu était centrée sur l’utilisation du stylet. L’intrigue se situe quelques mois après The Legend of Zelda: The Wind Waker.
Vous n’avez pas travaillé sur la version originale de The Legend of Zelda: The Wind Waker, mais vous connaissez « Link Cartoon »6 depuis longtemps.6. Link Cartoon : terme utilisé pour désigner Link dans sa version dessin-animé. Link Cartoon est apparu pour la première fois dans The Legend of Zelda: The Wind Waker, puis dans différents jeux tels que ceux de la série The Legend of Zelda, ainsi que Super Smash Bros. Brawl sur Wii.
Oui. Link Cartoon et moi, nous sommes de vieilles connaissances. C’était la première fois que j’officiais sur The Wind Waker en tant que développeur, alors j’ai rejoué à l’original et j’ai retravaillé certains éléments qui me semblaient perfectibles.
Je vois. À vous, Takizawa-san.
J’étais responsable du design sur la version originale, et en tant que membre de l’équipe de design principale, j’ai été impliqué dans la direction artistique du jeu. J’étais aussi en charge des personnages ennemis et des effets. Et cette fois-ci, je euh... quel était mon rôle ? Directeur du lifting des graphismes en HD ?
C’est un peu long ! (rires)
En résumé, j’ai réfléchi à la façon de transposer tous les graphismes en HD, et je m’en suis occupé en grande partie en personne.
En d’autres termes, vous étiez le directeur visuel. Et vous, Dohta-san ?
Le jeu original est sorti avant que je n’intègre Nintendo, alors pour ma part, j’y avais juste joué.
Oh, vous y aviez joué !
Oui. J’y ai joué à l’époque. Sur le projet, j’ai fait équipe avec Takizawa-san et j’étais directeur du programme de refonte en HD. J’ai supervisé les aspects techniques du passage des graphismes de l’original sur Nintendo GameCube à la version Wii U.
Pour finir, à vous, Arimoto-san.
J’ai participé à l’original en tant que designer. J’ai collaboré à la création du monde du jeu d’après les dessins conceptuels de Takizawa-san et de (Yoshiki) Haruhana-san7. Cette fois-ci, je me suis chargé de prendre les données de l’original et de les faire fonctionner ! (rires)7. Yoshiki Haruhana : membre du Département de développement logiciel, division Analyse et développement du divertissement (EAD). Avec Satoru Takizawa, il était responsable du design sur The Legend of Zelda: The Wind Waker sur la console Nintendo GameCube. Il a participé à la session de « Iwata demande » sur The Legend of Zelda: Ocarina of Time 3D avec l’équipe de développement originale (2e partie) .
Vous étiez responsable du bon fonctionnement du jeu.
Oui, c’est ça. Takizawa-san et moi avons consulté les données de l’original et nous avons commencé à les rassembler.
Bien, nous pouvons poursuivre. La version originale de The Legend of Zelda: The Wind Waker est sortie en 2002 (au Japon), mais au NINTENDO SPACE WORLD8 l’année précédente, en 2001, nous avons dévoilé des images du nouveau jeu Zelda.8. NINTENDO SPACE WORLD : salon de jeux vidéo organisé autrefois par Nintendo au Japon.
C’est exact.
Cette présentation a surpris tous les fans de Zelda, et nombre d’entre eux ont été décontenancés. Comment vous est venue l’idée de ces graphismes et comment avez-vous créé ce monde ? En d’autres termes, pouvez-vous m’expliquer la genèse de Link Cartoon ?
Eh bien… ce look n’est pas celui que j’avais proposé au début.
À l’époque, Haruhana-san et moi faisions partie du noyau dur, et dès le début, nous avons réfléchi à l’orientation graphique du prochain jeu Zelda. Nous nous sommes demandé si c’était une bonne idée de continuer visuellement sur la lancée d’Ocarina of Time.
Vous cherchiez dans quelle direction aller pour faire évoluer la série.
Tout à fait. J’exagère peut-être un peu, mais nous nous sommes demandé si c’était « la bonne voie ».
Nous aurions évidemment pu continuer dans cette voie, et nous avons d’ailleurs conçu un prototype, mais le rendu était des plus banals.
Néanmoins, l’aspect visuel s’était amélioré. Au NINTENDO SPACE WORLD l’année précédente, en 2000, lorsque nous avons fait l’annonce de la Nintendo GameCube, nous avons présenté une vidéo de démo avec un Link dans la lignée de The Legend of Zelda: Ocarina of Time. Ainsi, beaucoup de gens s’attendaient à ce que le jeu poursuive sur cette lancée.
Oui. Mais il aurait été difficile pour nous de trouver de nouvelles idées et de faire évoluer ce monde. Évidemment, un jeu ne se résume pas qu’à ses graphismes, mais il allait être créé en grande partie par les mêmes personnes, et notre créativité a ses limites.
L’ensemble du noyau dur de l’équipe de développement pensait que poursuivre sur cette lancée n’était pas souhaitable. Et un jour, Haruhana-san nous a présenté ce nouveau Link .
Comme ça ?
Oui, comme ça, sans prévenir.
Dès que j’ai vu ce dessin, mon esprit créatif est entré en ébullition et je me suis dit : « Ce personnage pourra faire des actions qui auront l’air naturel, quelle que soit sa façon de bouger ! »
Peu de temps après, vous avez dessiné un moblin 9. 9. Moblin : monstre mi-homme mi-bête de la série The Legend of Zelda. Il en existe de différents types, dont certains sont experts en maniement d’armes.
Oui. J’ai tout de suite été inspiré par le croquis de Haruhana-san et j’ai dessiné un moblin en me disant : « Les ennemis ressembleront à ça ! »
Ensuite, nous nous sommes demandé comment les faire s’affronter, et les idées ont commencé à fuser de toutes parts. C’est là que je me suis dit : « Ça va marcher ! »
Le croquis de Haruhana-san a servi de déclencheur.
Les animations sont aussi venues très rapidement. Lorsque nous avons eu les première images, je me souviens d’Aonuma-san plutôt détaché qui disait : « Oh, c’est à ça que vous pensez… Hmm… » Mais quand il a vu la démo, il a dit : « Waouh ! Ils sont trop mignons, je les adore ! »
(rires)
Quand on retrace l’histoire des jeux Zelda, c’est souvent comme ça. Pour Ocarina of Time aussi, une fois que nous avons eu Link et un certain type d’ennemis, la mécanique de jeu s’est mise en place rapidement.
La structure de l’action et les éléments d’interaction sont le point de départ de tout le reste. Une fois que vous les avez trouvés, le reste s’imbrique rapidement.
Dans le cas de The Wind Waker, les dessins de Link et des moblins ont été le déclencheur. Les choses ont rapidement évolué autour de la façon dont nous voulions qu’ils se battent.
L’autre intérêt de ces graphismes était de pouvoir représenter les mécanismes et les éléments10 des énigmes de façon plus compréhensible. Quand les graphismes sont trop photo-réalistes, l’effet inverse se produit et il est difficile de représenter les informations en termes de gameplay.10. Élément : objet placé dans l’espace d’un jeu vidéo. Ici, le terme désigne des objets et des formes utilisées dans les mécanismes servant à résoudre des énigmes.
Dans un jeu vidéo, plus les graphismes sont photo-réalistes, plus ils posent problème.
Exactement. On a du mal à discerner ce qui bouge et ce qu’on est censé toucher. Mais si on altère le style visuel des parties qui bougent, elles sautent aux yeux.
Nous avons évité ces problèmes de gameplay, et surtout, nous avons eu l’impression de proposer de nouvelles sensations de combat grâce aux actions stylisées réalisées par les personnages en cel-shading11. Nous avons donc été convaincus rapidement qu’il fallait partir dans cette direction.11. Cel-shading : type d’images de synthèse en 3D où le rendu des données a l’aspect d’un dessin-animé ou d’une illustration.
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