Permettez-moi de changer quelque peu de sujet. Qu’avez-vous pensé de la Nintendo 3DS lorsque vous l’avez vue pour la première fois ?
J’avais entendu qu’elle était stéréoscopique, mais j’imaginais que l’effet serait moins visible. J’ai été vraiment surpris de combien tout s’affichait dans une 3D digne de ce nom.
J’ai eu la même réaction en voyant le jeu Kingdom Hearts que vous aviez réalisé pour la Nintendo DS : vous êtes de ce genre de personne qui n’est pas satisfaite tant qu’elle n’a pas tiré parti au maximum des fonctions d’une console ou je me trompe ?
Vous devez avoir raison ! (rires)
Je me souviens avoir pensé la même chose en voyant The World Ends With You20. On peut dire sans se tromper que vos fans se demandent : « Qu’est-ce que Nomura-san va faire avec la Nintendo 3DS ? » 20The World Ends With You est un jeu de rôle et d’action sur Nintendo DS commercialisé en juillet 2007. Tetsuya Nomura était le concepteur du personnage principal et le producteur créatif.
J’imagine... Avec un nouveau titre comme The World Ends With You, vous pouvez faire preuve d’audace et essayer plein de nouvelles choses. Cependant, quand je pense aux fans de Kingdom Hearts, je sais que je ne peux pas aller si loin. À la place, j’ai essayé de trouver des moyens d’utiliser ces nouvelles fonctions où cela me paraissait possible. Ce qui me plaît le plus dans la Nintendo 3DS, c’est qu’elle prend en charge les commandes analogiques. Ces commandes sont importantes pour les jeux d’action, et c’était un grand soulagement pour moi.
L’action fluide de ce titre semble être la plus dynamique de tous les jeux de la série. En y regardant à deux fois, vous sentez bien que les commandes analogiques sont un must.
C’est exact. La console Nintendo 3DS est une machine véritablement audacieuse, et les graphismes stéréoscopiques offrent un incroyable sentiment de profondeur. C’est pour cette raison que les visuels sont si dynamiques. Cette fluidité était la première caractéristique que je souhaitais obtenir pour Kingdom Hearts 3D.
Cette fluidité faisait-elle partie de votre vision originale du jeu ?
Tout à fait. Cette idée était issue du fait que la console Nintendo 3DS dispose de graphismes stéréoscopiques et de commandes analogiques. En fait, l’équipe qui a travaillé sur le dernier jeu se plaint que les mouvements des jeux plus anciens comme BBS21 ou KH II sont trop lents. Ainsi, ils m’ont dit : « Une fois que vous avez goûté à la fluidité de l’action en 3D, vous ne pouvez pas revenir en arrière », ou « Un jeu Kingdom dans lequel vous ne pouvez pas sauter et prendre appui sur un mur n’est pas un jeu Kingdom. » (rires) 21BBS renvoie à Kingdom Hearts: Birth By Sleep, un jeu de rôle commercialisé au Japon en janvier 2010.
Ainsi, même les membres de votre équipe ont confirmé qu’ils ne pourraient plus autant apprécier les jeux précédents après avoir goûté à la fluidité de celui-ci ! Est-ce que cela a été difficile de créer un jeu en utilisant des graphismes si dynamiques ?
Cela n’a pas été évident. Comme vous pouvez maintenant prendre appui sur un mur pour sauter aussi loin que vous voulez, nous devions créer des cartes beaucoup plus grandes que dans les jeux Kingdom Hearts habituels. Ces sauts sont également un peu plus difficiles à contrôler, mais... ils vous feront rire ! Vous ne croirez jamais jusqu’à quelle distance vous pouvez sauter ! (rires)
Vous avez ri à une fonction que vous avez ajoutée ?! (rires)
Exactement, puis je me suis dit que c’était sûrement un atout que ce soit amusant. De plus, apprendre à placer certains mouvements est aussi ce qui rend un jeu d’action amusant.
Effectivement, vous pouvez très rapidement devenir très attaché à ce genre de choses. Regarder quelqu’un y jouer vous donne vraiment envie d’essayer.
Je le crois aussi. Mon passage préféré de Mario 64 était celui devant le château. Il n’y avait pas d’objectif précis ; vous pouviez simplement courir, sauter et glisser. C’est tout à fait ce que j’avais en tête quand j’imaginais la fluidité d’action de Kingdom Hearts 3D.
Oui, je me souviens que (Shigeru) Miyamoto-san disait qu’il voulait obtenir un jeu dans lequel le simple fait de prendre la manette et de parcourir le monde serait amusant, même lorsqu’il n’y avait pas de mission à remplir. Quand j’ai vu qu’il y était parvenu, j’étais vraiment impressionné, car c’était un objectif que je m’étais également fixé. Mario répondait exactement à vos ordres lorsqu’il se déplaçait, et on aurait dit que tous ses mouvements s’enchaînaient avec fluidité. En fait, je pense que Mario 64 a changé le jeu d’action à tout jamais.
C’est vrai. Être en mesure de se déplacer sans entraves est la qualité première du jeu d’action. Dans ce jeu, nous avons essayé d’offrir encore plus de libertés. Les sauts ne sont pas faciles à placer au début, mais vous êtes heureux lorsque vous les maîtrisez.
J’espère que de nombreuses personnes ressentiront ce plaisir. Maintenant, combien d’idées se retrouvant dans le jeu final faisaient partie de votre vision de départ, et combien en avez-vous trouvé en cours de développement ?
Je crois que rien de ce qui se retrouve dans le jeu n’était vraiment comme je l’avais imaginé et conçu au départ. Plusieurs collaborateurs ont proposé des idées, et j’en étais très heureux. L’essentiel était qu’elles soient amusantes. En fait, ça n’aurait pas été très amusant si les choses que j’ai imaginées s’étaient déroulées exactement comme je l’avais imaginé. J’avais la vision du jeu en tête depuis longtemps, mais lorsque d’autres personnes m’ont donné leur avis cette vision a pris de l’ampleur et que j’ai pu dire : « Nous réalisons quelque chose d’audacieux. »
Vous avez probablement toujours pensé qu’il y avait une solution que vous trouveriez tous ensemble, et vous aviez une foi suffisante pour continuer à la chercher.
Oui. Je ne parviens pas à m’écarter de la voie que je me fixe au départ, et je garde toujours à l’esprit l’image d’un objectif assez vague et général sur lequel nous pointons. Ainsi, même lorsque les dernières idées proposées ne sont pas tout à fait celles que j’avais imaginées au départ, cela ne me dérange pas tant qu’elles sont amusantes ou intéressantes.
D’accord. J’aimerais maintenant vous parler des gentils Dream Eaters .
L’idée m’est venue parce que ma famille avait des chats et des chiens quand j’étais petit. Ce qui nous lie aux animaux domestiques, c’est que vous êtes là dès leur naissance et tout au long de leur croissance. Vous développez une véritable affection pour eux. C’est pour ça que je me suis dit que si les Dream Eaters devenaient les compagnons des joueurs dès leur naissance, ces joueurs auraient pour eux une affection semblable à celles qu’ils ont pour leurs animaux domestiques. C’était ma motivation lorsque j’ai créé ces gentils Dream Eaters.
Je comprends.
De plus, la plupart des jeux qui permettent de gagner l’amitié de vos ennemis proposent des combats basés sur des commandes. Je voulais essayer de parvenir à la même chose lors de véritables combats.
Il existe peu de jeux d’action et de combat qui permettent de gagner l’amitié de personnages qui étaient vos ennemis au départ et de combattre à leurs côtés.
Eh bien, cela n’a pas été facile, mais j’étais déterminé à y parvenir le premier. Je savais que combattre aux côtés de ses anciens ennemis lors de combats très audacieux serait très amusant. Je voulais donc être le premier à y parvenir. Sora peut désormais lancer ses camarades, les chevaucher, et bien plus encore.
Vous venez de parler de « chevaucher », mais intégrer cette option a considérablement accru votre charge de travail, non ? (rires)
Oh oui. C’est plus facile à dire qu’à faire ! (rires)
Ainsi le concept de gentils Dream Eaters a vu le jour parce que vous vouliez un système de jeu original et des visuels uniques, et aussi parce que vous aviez eu des chats et des chiens pendant votre enfance ?
C’est bien ça. Nintendogs22 a aussi eu un grand impact sur moi ; la façon dont le jeu vous met en contact avec vos animaux. J’avais toujours les combats en tête, et je me demandais donc : « Pourquoi mes Nintendogs ne peuvent pas se battre ? » (rires)
(rires) 22Nintendogs est un jeu de simulation et de communication sur Nintendo DS commercialisé au Japon en avril 2005.
Lorsque vous promenez votre Nintendogs, il rencontre d’autres chiens via StreetPass. Imaginez s’ils pouvaient se battre !
Vous vouliez combattre les autres chiens que vous rencontriez ?! (rires)
Régulièrement, je me disais : « Est-ce qu’ils vont se battre... ? » mais bien sûr, ça n’est jamais arrivé. (rires) 23StreetPass est une fonction de communication qui permet l’échange de données avec des passants, en laissant votre Nintendo 3DS sous tension et en la promenant avec vous.
(rires) C’est vrai, lorsque nous tombons sur une œuvre créative novatrice, nous en tirons toujours une certaine dose d’inspiration. En ce sens, nous nous renvoyons sans cesse une balle invisible, d’une certaine manière.
C’est possible. J’ai toujours réalisé des jeux de rôle dans lesquels le système de combats est crucial. Je trouve donc assez difficile de penser à autre chose qu’au système de combats. J’ai demandé à l’équipe de THEATRHYTHM d’ajouter aussi des combats à ce jeu. Je leur ai dit que je voyais quatre personnes, alignées, et quatre rangées devant l’ennemi... Note de la rédaction : dans les combats multijoueur de THEATRHYTHM FINAL FANTASY, 4 joueurs maximum sont alignés devant l’ennemi. Chaque joueur a sa rangée horizontale sur l’écran, et des symboles se déplacent sur ces lignes, indiquant les actions que chaque joueur doit effectuer pour parvenir à vaincre l’ennemi.
Oh, je vois. Il semblerait pour vous qu’un jeu se définit en bonne partie par rapport à son système de combat, Nomura-san.
Cela reflète probablement ce que j’attends d’un jeu. Peut-être que je ne suis pas content tant que je ne me bats pas ! (rires)
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